Le Petit Giresse ou la carrière d'un "Grand"

Je vous propose de retracer en plusieurs épisodes la carrière d'Alain Giresse

-I- L'ADOLESCENCE DE GIGI

Avant les Girondins, pour lui, il n'y avait rien de véritablement structuré.
A Langoiran, les gamins n'avaient pas de possibilités de pratiquer en équipe de foot au village. Pas assez de gosses pour faire une formation . On démarrait avec les grands, ou l'on ne démarrait ...jamais!.

Son père Jacques Giresse, au demeurant un excellent footballeur, il fit les beaux jours de la Bastidienne, trouva rapidement une solution . Par voie de presse,Sud-Ouest, Jacques Giresse remarqua que les Girondins de Bordeaux organisaient une grande aprés-midi de détection pour les enfants du bordelais .

Il inscrivit le fiston, et le petit,P'tit Giresse de partir à l'assau de la grande ville . Une aventure pour le "drôle" . Autocar et concurrence au programme. Rocquevielle pour premier terrain. Des gosses plein la cour, du rêve en pépinière .
Une pépinière de rêves et d'espoirs déçus . " Oh, petit....a quelle place joues-tu ? " demanda Monsieur Laguens, son premier coach.
Que voulez-vous qu'il répondit, lui qui n'avait jamais évolué dans une équipe . A Langoiran, il frappait sur le pré, en regardant papa ou les copains de papa, ses potes de l'époque ne lui avaient pas collé un numéro dans le dos ni dans la tête. A tout hasard, ça sonnait bien, il lança timidement un petit :"Demi" . Tu seras donc "Demi!". En plein dans le mille, la première convocation ne tardera pas à venir .

Sainte Geramine, vous connaissez? Pas lui à l'époque, Ste Germaine était aussi loin de son quotidien que Canton ou Pékin pour d'autres aujourd'hui . Rendez-vous à la barrière du Médoc, avaient-il dit .
" Après, avec ma mère, nous avons demandé à la fleuriste de la barrière la route pour finir notre

J'ai trouvé le stade du SBUC, j'ai joué, et, nous avons gagné 17 à 0 . Pour une première ce n'était pas trop mal . Les dirigeants étaient contents de moi, par la suite, ils me prenaient au siège du club situé alors cours Georges Clémenceau, en plein Bordeaux . Mon bus s'arrêtait non loin de là, c'était beacoup plus pratique pour mes parents et pour moi " .



ci-contre : Concours du jeune Footballeur à Paris en 1969, Alain est entouré des représentants de la ligue du Sud-Ouest . -
( Péjo,Giresse,Biais et Caron )

L'heure n'était toujours pas aux doux rêves de carrière dans le milieu du ballon, l'idée n'était même pas en gestation dans la tête du petit Giresse .
Son entourage familial, réputé pour être attaché à de sûres valeurs, lui fit comprendre qu'avant d'envisager un parcours sportif, si bon soit-il, il fallait songer à préparer de solides lendemains de façon, peut-être, plus terre à terre, mais moins hypothétique . Papa était charpentier, le rejeton le sera .

Avant le CAP pas question de faire autre chose que du bois . Le diplome en poche, le gamin put enfin repartir à la conquête de ses rêves de gazon et de ballons, tout en se préparant le plus naturellement du monde à rejoindre, sur le plan professionnel, l'atelier paternel .

Alain Giresse est bien né aux Girondins de Bordeaux . Les coupures de presse soigneusement découpées et collées par le paternel en attestent bien plus qu'un extrait de l'état civil de la petite commune de Langoiran qui souligne, anecdotiquement, qu'effectivement un certain 2 Août 1952 venait au monde un banbin né de Théodora et Jacques Giresse qui, plus tard, répondrait au prénom d'Alain .

Le P'tit Gigi s'est fait sur le pré, sur un pré de 110 mètres de long sur 70 de large . Un rectangle magique qu'il apprivoisa patiemment pendant de nombreuses années sans chercher à le provoquer ,ni le brusquer . Si, à Langoiran, les équipes de jeunes n'étaient pas légion, aux Girondins, Giresse connaîtra pratiquement tous les paliers pour accéder aux sommets .

Certes, dans certaines catégories, il ne s'attardera pas longtemps, tant son oeil vif et ses coups de pattes déjà meurtriers avaient trouvé preneur chez les entraîneurs du moment . On se le disputait . Une carrière commençait alors à se dessiner et les sollicitations extérieures au club d'affluer . Les sélectionneurs régionaux, dans un premier temps, puis nationaux voyaient en lui un probable . Un probable seulement, car l'air du temps est aux monstres du muscle . Pour réussir, mon drôle, faut faire la maille . Force est de reconnaître que Gigi a toujours eu quelques difficultés à passer pour un athlète . Pour percer, il se devra de compenser par une intelligence de jeu et une adresse hors-normes .

à suivre

L'ADOLESCENCE DE GIGI Suite

Attentif mais discret, Jacques Giresse suit les premiers pas de son rejeton. La colle et les ciseaux à papier lui font, le soir,oublier la colle et les ciseaux à bois du charpentier . Les articles de la presse locale s'amoncellent .

Sur la deuxième page du cahier est écrit : " Saison 1965-1966 " . Bref survol . Cette année-là, les minimes des Girondins s'adjugent la Coupe du Sud-Ouest . Dans cette équipe on retrouve quatre joueurs parmi ceux qui avaient fait parler d'eux lors de la saison précédente : Labbé,Ansaldo,Grimonpon et ....Giresse .
Arrive la saison 1966-1967 . A l'Ouest et dans le Sud-Ouest, ligues pilotes pour les instances fédérales et placées sous la direction respective d'Henri Guérin et de Christian Fétis, sont organisés des stages en vue de détecter les meilleurs jeunes .
Ainsi, du 28 Mars au 1er Avril, Alain Giresse est-il retenu parmi cinquante autres joueurs . Doté d'une technique peu commune, il remportera la première place au concours régional du jeune footballeur . Cadet première année, il est cependant jugé trop petit pour être retenu dans la sélection régionale. Il attendra une année encore pour rejoindre le Pauillacais Jean-Paul Bertrand-Demanes et le Béciste Francis Meynieu . Ce qui ne l'empêchera pas, cette saison 1968-1969, de terminer troisième du concours national du jeune footballeur, derrière Michel Dupraz et Bernard Rossi .

Un concours peu relevé, aux dires de France Football, qui, dans ses colonnes, rapporte quelques jours après : " la plupart des concurrents semblèrent à la fois trop peu audacieux et trop peu concentrés. Dans le jeu de volée en particulier, les frappes de balle de bonne qualité furent assez rares." Et de regretter " des candidats de valeur très supérieure comme avaient pu l'être, ces dernières années, un Chiesa ou un Sarramagna ."

( avec M Laguens, premier dirigeant aux Girondins )

Alain Giresse ne s'en formalise pas. Pas plus, d'ailleurs, que du nouvel échec des professionnels Girondins en finale de la Coupe de France, contre Marseille (0-2), après avoir déjà succombé l'année précédente contre St Etienne . " J'étais surtout heureux d'avoir obtenu mon CAP de charpentier et je me préparais à travailler avec mon père . Pas une seule fois l'idée ne m'avait effleuré que, du football, je puisse faire un métier."

Et pourtant......
Quand se termine l'été 1969, Bakrim (l'entraîneur de l'équiipe pro) convoque Alain Giresse au rassemblement des Girondins, professionnels et amateurs confondus . C'est Pierre Danzelle, l'entraîneur de ces derniers- rétrogradés du Chapionnat de France à la Division d'Honneur Régionale - qui lui annonce la nouvelle : " Petit, prépare-toi, car tu joueras dimanche, à Lacanau, contre les pros! "

Le petit Giresse n'en croit pas ses oreilles . Il bafouille. Il bredouille quelques mots pour s'esquiver : " Ce n'est pas possible; Monsieur, dimanche je suis de mariage..." Est-ce le mensonge ou bien la fierté qu'il conçoit à cette minute présente? Le rouge lui empourpre les joues .

" Je me souviens, aujourd'hui encore, du trouble qui s'était emparé de moi . Je ne comprenais pas . Je ne parvenais pas à réaliser . Je sortais à peine des rangs cadets et j'allais affronter Péri,Simon,Ruiter, Wojciak...Il a fallu que mon père me pousse à y aller . Je me suis assis dans le bus, au milieu des pros, avec un trac énorme . Ils m'ont tout de suite mis à l'aise . J'ai joué une mi-temps . Un bon truc! J'étais heureux, soulagé même . Non point d'avoir bien joué que de ne pas m'être senti ridicule . J'étais junior première année et je venais de gagner ma place dans l'équipe amateurs . Des matches homériques à Libourne, à Camblanes, autant de coins que je connaissais bien . Mon premier match, au stade de Galin, contre le SBUC : on gagne 6-0 et je marque un but . Match suivant à Saint Seurin sur l'Isle et, ainsi de suite, jusqu'à la fin de la saison ."

Mais là, avant que de disputer sa troisième rencontre avec les amateurs, une autre nouvelle vient le mettre en émoi: Bakrim l'a retenu, avec les professionnels, parmi les seize joueurs appelés à rencontrer les Ecossais de Dunfermline pour un huitième de finale de la Coupe d'Europe des Ville de Foire. Remplaçant, aux côtés de Michelena,Nouzaret,Madronnet et Escudé ( le père des frères Escudé le Tennisman et le footballeur), il écarquille les yeux " je suis dans un vestiaire de pros. Je m'habille comme les pros. Je suis sur le banc des pros. Heureusement, je ne suis pas rentré sur le terrain . Les coups pleuvaient de partout."

Titulaire chez les réservistes, tenu en réserve chez les professionnels, Alain Giresse va retenir l'attention de Jaky Braun, responsable technique de l'Equipe de France juniors . Et pourtant, à aucun moment, il ne songe à embrasser une carrière de footballeur. " Je ne touchais aucun dédommagement financier des Girondins et je continuais à travailler dans l'entreprise de mon grand-père. Je bricolais plutôt ..."

Jaky Braun, lui, vient de mettre sur pied un match amical devant servir à désigner les trois juniors premièere année qui rejoindront leurs aînés d'un an en Suède . Dans cette équipe proposée aux Portugais de France, en lever de rideau de France-Portugal, on retrouve Dropsy,Zwunka, Dahleb et notre Giresse . Le résultat 9-0 se passe de commentaires, mais dans la reflexion de Jaky Braun reviennent les noms de Lechatelier, Simon et Giresse ( auteur de deux buts ) .

Lui annonçant sa sélection, Jaky Braun enjoint Alain Giresse de se rendre au plus vite à Bordeaux pour y aller quérir ses affaires avant l'envol pour Stockholm . " Pas la peine, lui répond-il, j'ai déjà tout avec moi.."

Dans la capitale suédoise, il retrouve Bertrand-Demanes, avec qui il défendait les couleurs des cadets du Sud-Ouest . Il ne connaît pas encore Gardon,Boissier,Arribas,Lopez,Santini,Sarramagna, Lacombe . Mais cela ne tardera pas . Au-delà de la victoire (2-1), il retiendra les propos flatteurs tenus à son endroit par un journaliste au légendaire cigare et à la boutonnière ornée d'un seyant oeillet rouge . " J'avais été trés touché par ce qu'avait dit alors Jean Eskenazi, comme je devais l'être bien plus tard encore quand j'ai lu dans Foot2, ce qu'il écrivait à mon propos juste avant le mondial ."

L'Heure du choix va sonner pour Alain Giresse. Pour lui, les entraînements sont devenus quotidiens . Un beau jour de décembre, son pèere est convoqué par les dirigeants bordelais . " Votre fils, lui dit-on, touchera désormais sept cent francs par mois " . Le père et le fils n'en reviennent pas. " J'étais tellement effrayé à l'idée de percevoir un salaire que j'ai attendu trois mois avant de passer au siège y retirer mes chèques ..."




A suivre " Les Emerveillements de Gigi"

Merci Napeso.

Quel grand joueur ce "petit bonhomme" !

dommage que sa carrière d'entraineur ne soit pas à l'image de celle du joueur (enfin pour le moment)

Avec son copain Philippe Goubet, Gigi va faire exploser toutes les défenses adverses : 2-0 contre Niort ( deux buts de Giresse), 2-1 contre Rodez ( un but de Giresse), 0-0 contre Mazamet et 6-1 contre Montmorillon . "C'est aprés ce match-là, que Monsieur Gérard m'a laissé entendre que je débuterai avec les professionnels ...."



Le 17 Octobre 1970, très exactement, sur le terrain du stade Jean Bouin à Nimes .
Le lendemain du match nul (1-1) des Girondins à Nimes, sous la plume de Cécil Berninet, Sud-Ouest avait titré " Giresse a gagné une bataille" . Gigi n'a pas oublié " Bordeaux occupait alors la dernière place du classement . Nous avions fait le déplacement en train, dans le wagon de queue!...avec la lanterne rouge accrochée derrière . Ce jour-là, j'ai fait la connaissance de Mr Pététin ..."

Pététin, surnommé "Petit train par les joueursparce qu'il occupe un poste de responsabilité à la S.N.C.F. est resté le compagnon des bons et des mauvais jours aux Girondins .

"Arrivé à Nimes, j'ai connu le trac du débutant . Pourtant je me sentais bien, trés concentré même . Et puis, une fois sur le terrain, j'ai tout oublié . Je n'entendais, ni même ne voyais le public ."

Dés le dimanche suivant, il débutait sur la pelouse, sa pelouse, celle du Stade Municipal, le Parc de Lescure, face à l'une des plus prestigieuses équipes de l'histoire du football Français : L'Association Sportive de Saint-Etienne . Tout doucement, sur la pointe de ses petits pieds, il venait d'entrer dans la carriere ...

Alain Giresse allait faire les manchettes de tous les journaux spécialisés .
Sud-Ouest Giresse, le meilleur attaquant, But : Giresse peut sauver les Bordelais ...Dans le Parisien Libéré, Albert Batteux n'y va pas par quatre chemins : " Avec Giresse, Bordeaux ne restera pas longtemps dernier " . et Francis Huger lui fait écho dans France Soir : " Dans le rapport de Michel Hidalgo, observateur régional de la Fédération, comme dans le coeur et dans la vois des spectateurs bordelais, un nom nouveau est apparu : Alain Giresse . "

Le bonhomme - dix-huit ans depuis les vendanges - exposa l'éventail le plus riche, le plus varié qui soit, des talents d'un footballeur....Et, si on le nomme encore " le Péquègne", c'est à cause de sa taille car, trés vite, il sera un grand footballeur .....

Les comparaisons affluent . Pour Jacques Etienne dans L'Equipe, la similitude est frappante " Alain Giresse ressemble à s'y méprendre à Roland Guillas : même morphologie, petite taille et cuisses énormes, dribles courts, vision instantanée du jeu et passes au millimètre . C'est à dire qu'il possède un registre trés complet et qu'il est à l'orée d'une brillante carrière . D'autant qu'il n'a pas froid aux yeux et qu'il sait ce qu'il veut ..."






En haut , debout de gauche à droite : Dubouil,Barrat, Meynieu, Bergeroo,Rigoni, Wojciak, Merelle
Assis : Papin(Gérard), Giresse, Goubet, Dos Santos, J. Gallice, Lipo, Lattuada entr. Phelippon

Solidement accroché à sa tenue bordelaise, Alain Giresse commence à faire du club des Girondins de Bordeaux, l'un de ses nids privilégiés . Entre Haux près de Langoiran, Rocquevielle et le Stade Municipal, Gigi a organisé sa vie autour du ballon .
Jeune, les dents longues, il ne rêve alors que de titres et de coupes pour son club . Il débute, il ne connaît pas encore la dure réalité de ce métier, où les mauvais jours sont aussi présents, sinon plus, que les jours fastes . Il apprend le boulot . Pendant de nombreuses saisons, il ira de désillusions en rêves retardés, différés . Le professionnalisme c'est bien, mais cela se digère lentement . Les matches galères se suivent régulièrement, histoire de se forger un vécu et se durcir les tibias .
"Je me suis aperçu que la marge de progression dans le football est assez limintée, et qu'il n'est pas évident de confirmer du jour au lendemain des qualités dévoilées trés tôt . En fait, les gens attendent toujours de vous une progression, une solution, aussi importante que celle que tu peux créer en débarquant dans le milieu . Une fois l'effet de surprise passé, la passion et la réceptivité du public à ton égard s'émoussent . "

Tiraillé entre l'Equipe de France juniors, dont il est devenu le capitaine aux côtés de Lacombe( déjà ), Boissier, Merchardier, Courbis, Neubert, Berdoll et autres Cuperly, Gili se démène - se surmène aussi - comme un petit diable .

Les Girondins inexorablement, ont refait leur retard au classement . Les voilà en milieu de tableau et quart-finaliste de la Coupe de France .

La fin de saison approche, on s'active en coulisses . Au bas d'un parchemin présenté par René Gallice, Alain Giresse appose le paraphe qui fait de lui un professionnel pour quatre ans . Quelques jours auparavant, dans le derby aquitain Bordeaux-Angoulême, le Directeur sportif des Girondins s'est laissé séduire par son petit prodige et par un jeune attaquant angoumoisin dont il aimerait bien s'attacher aussi la signature. Il s'appelle Jean ......Gallice ! .

C'est le Bordeaux nouveau qui arrive, fait de produits du terroir : Giresse,Gallice, Meynieu (B.E.C.) Bergeroo ( St Jean-de-Luz ) Barrientos ( Cenon) ....un Bordeaux sur lequel Jean Roureau, porté à la présidence du comité de gestion, veille avec le soin jaloux de l'oenologue . Mais il n'ignore pas ce négociant en vins des Etablissements Eschenauer, gestionnaire rigoureux ( tiens, tiens cela ne vous rappelle rien ??), que ce Bordeaux-là devra vieillir . Il a du corps, du bouquet, de la moelle, mais il est encore un peu jeune ..
D'aucuns lui trouveront même un goût de bouchon . Avec trente-neuf buts seulement dans tout l'exercice 1971-1972, il ne sera trouvé que le Red Star (34buts) pour faire moins bien dans le domaine offensif .






Le 25 Octobre 1970, Alain Giresse débute en Championnat à Bordeaux


à suivre

Les interrogations de Gigi

" La saison 1971-1972 n'ayant pas donné les résultats que nous espérions, cela a été ressent, bien évidemment, au plan de la trésorerie, et il nous a donc fallu agir avec pondération au niveau du recrutement, alors que les prix des transferts, dans certains cas, ont atteint des valeurs records, tout en ayant conscience de mettre sur pied une équipe qui doit obtenir des résultats satisfaisants en championnat et, plus encore, en Coupe de France . De toute façon, il nous faudra encore et toujours nous améliorer, et c'est ce à quoi les responsables, y compris bien sûr le nouvel entraîneur Pierre Phélippon, continueront à s'employer avec plus de détermination que jamais . "

Derrière cet optimisme de façade, Jean Roureau dissimule assez mal le septicisme qui l'habite avant l'ouverture de la saison 1972-1973 . Il sait bien que les arrivées d'Arnaud Dos Santos ( Monaco) et de Patrice Barrat ( Limoges) ne compenseront qu'imparfaitement les allées et venues de Gigi entre le camp de Souges et le camp d'entraînement de Roquevielle .

Trois selections en "bleu-blanc-rouge" avec l'équipe de France des moins de vingt et un ans, contre l'Italie ( à Bergame), contre la Tunisie ( à Tunis) et contre la Finlande ( à Lahti), n'ont fait qu'exacerber la répugnance du Bordelais a rester figé devant les couleurs à l'écoute d'une Marseillaise trop martiale . Le moral de Gigi est en berne et sa condition physique en souffre .



But contre Reims (3-1) le 10 Janvier 1971 de gauche à droite: Petyt,Grabowski, Brucato et Giresse


Finalement, Bordeaux terminera au quatorzième rang : douze victoires, onze nuls et quinze défaite . Un an plus tard, le club girondin n'aura pas avancé d'un pouce : onze victoires douze nuls et quinze défaites ....

Seule consolation, et non des moindres, dans cet environnement sans grande envergure sportive, son mariage . En effet, le 13 Juillet 1974, il offre enfin un "Oui" franc et massif à Chantal Lacoste . La charmante institutrice rejoint ainsi le clan des Giresse .
Sur les coteaux face à Bordeaux, là d'où on peut voir le soleil venir se coucher dans la garonne . Elle lui préparera une famille .
Mathieu, l'ainé, puis Thibault ( maintenant joueur à Toulouse) un peu plus tard redonneront à Gigi l'envie de se battre pour son club de toujours . Il en aura bien besoin .

En 1977, le public bordelais fait savoir à Giresse que son soutien n'est plus aussi total . Le torchon s'enflamme . La foule veut une tête, celle de Giresse ferait l'affaire . Ses bonnes prestations pour ses débuts en équipe de France calmeront les supporters du cru . Seul, Jacques Giresse, son père, sortira définitivement meurtri de la tempête, il décide de ne plus jamais remettre les pieds au Stade Municipal .

Ces douloureux épisodes auront tout de même le mérite de stimuler Bordeaux et certains de ses joueurs dont Gigi . 1978, arrive, les choses ne vont pas tarder à bouger . Le club entend désormais mener une autre politique plus dynamique, plus concurrentielle . La valse des joueurs de grands talents se dessine .

Piqué au vif, fier de nature,Gigi en son for interieur supporte mal que des vedettes venues d'ailleurs viennent lui voler une part de sa notoriété. Ils vont voir ce qu'ils vont voir !!



de gauche à droite : Furlan ( l'actuel entraîneur de Troyes) André Gallice,Barthou, Ferri, Chanceaulme,Camus,Giresse, Montes( entraîneur) Ferratge,Lalanne,Rohr,Buigues,Jeandupeux,Tokoto, Bergeroo

Avec un panache quelque peu revanchard, Alain Giresse apprend à se remettre en question . La place au centre des manoeuvres sur le terrain n'est plu un dû pour lui . Il se bouge pour, non pas se hisser au niveau des arrivants, mais bien pour leur montrer qui est le maître sur Bordeaux et banlieue .

Avec de telles dispositions, c'est tout un groupe qui trouvera son salut . Oubliées les heures tristes de l'anonymat, les rencontres du dimanche après-midi où d'un côté du stade à l'autre, l'on pouvait l'interpeler en chambrant gentiment les joueurs .

Désormais, rien ne serait comme avant. Les Girondins de Bordeaux FC avec Alain Giresse à leur tête sur le rectangle magique, pouvait alors envisager de jouer le premier rôle sur la scène nationale et relancer de doux rêves de conquêtes Européennes . Lui qui voulait tellement titres et Coupes, allait pouvoir enfin toucher du doigt ses ambitions de bambin .

A suivre Bordeaux ère Bez

Je me rappelle avoir eu au dessus de mon bureau, chez mes parents, un article de l'équipe résumant son dernier match : son jubilé. avec le temps il est devenu jaune et lorsque je l'ai enlevé on pouvait voir les traces de punaises. Gigi est un grand joueur, l'un des plus grand que le club ai jamais eu.

C'est vraiment excellent! Quel régal...

Merci, Monsieur Napeso!

Bordeaux et Claude Bez

Don Luis …..

1978 – Tandis que le Mundial déroule des fastes, Bordeaux groggy cherche à retrouver ses esprits . Un point c'est tout. Un tout petit point qui permet d'éviter la honte d'une descente en Division II . Le gong a retenti à temps . Quand Bordeaux perd, tout le pays du vignoble grince des dents . Ici, on a la piquette en horreur, surtout lorsqu'on doit la subir . On reporte cependant la révolution à une date ultérieure, mais l'heure est à une profonde évolution . On prend les cartes, on coupe les cartes et l'on découvre un nouveau président, un nouvel entraîneur, un nouveau capitaine et dix-huit mutations de joueurs…le Bordeaux 1979 a du corps, certes, mais il possède ausii de la légèreté et beaucoup de bonne humeur…

Comme tous ses confrères, France Football se penche sur la nouvelle orientation prise par les Girondins en ce début de saison 1978-1979.

Ce Bordeaux qui étonne, qui détonne ( au sens de choquer) mais ne bétonne plus, c'est le Bordeaux de Claude Bez . Tour à tour trésorier, puis vice-président, ce jovial expert-comptable qui tient l'un des plus gros cabinets d'affaires en France a voulu relever le défi de Jean Roureau, son prédécesseur et néanmoins ami . Il veut faire des Girondins un club européen .

Comment expliquer autrement qu'Alain Giresse ait signé un nouveau bail de quatre ans ? " Je savais qu'avec le Président Bez et Didier Couécou pour le seconder dans un rôle de Directeur Sportif, Bordeaux allait évoluer, naître à l'ambition …et puis je ne tenais pas à quitter la région " .

Après Gigi, ont signé à Bordeaux : Momcilo Vukotic ( l'ancien capitaine du Partizan de Belgrade), André Tota ( Troyes), Philippe Redon ( Rennes), André Guesdon ( Bastia) Christian Delachet ( Valenciennes) et Nambatingue Toko ( Strasbourg ) . En cours de saison, en échange de la liberté rendue à Guesdon et Toko, Jacky Vergnes, Georges Van Straelen et Ange Di Caro rallieront la métropole Aquitaine .

A cette constellation de noms, il ne manquait plus qu'à ajouter le nom d'un entraîneur . Il arrivera par un beau matin d'août, alors que l'entraînement a déjà repris sous la direction ( provisoire) de Christian Montès .

Louis Carniglia possède la double nationalité : il est né argentin et malin tout à la fois . Ray-ban et cheveux d'argent plaqués sur les tempes, port altier et voix de velours façon Carlos Gardel, il laisse échapper de son passeport estampillé à Buenos Aires, une carte de visite qui fait regretter à Guy Roux de n'avoir pas été douanier à l'aéroport de Bordeaux- Mérignac . Ecartez-vous, voici Don Luis !



Luis Carniglia

Luis El Magnifico qui, jadis, porta les couleurs de l'OGC Nice et remporta sous elles, la coupe de France 1952 ( la plus belle…… contre Bordeaux!) et 1954 …Luis El Divino qui, quelques années plus tard, conduisit le Real de Madrid des Kopa, Gento et autres Di Stéfano, à la quête de la coupe d'Europe en 1958 et 1959 .

Il est fûté Don Luis : il sait qu'il ne sait pas . Un beau jour à l'écart des autres joueurs qui s'entraînent sous la houlette de Christian Montès, il prend Alain Giresse à part et lui demande " D'après toi, combien va-t-on se classer cette année ? " .



Une confiance réciproque est née entre joueur et entraîneur .

Pour le premier match de la saison, le 19 Juillet, Alain Giresse porte le brassard de capitaine et, pour témoigner sa gratitude à celui qui l'en jugé digne, inscrit le but qui permettra aux bordelais de faire match nul (1-1) avec les sochaliens .( J'y étais)

A la trêve, Bordeaux exulte . Bordeaux est cinquième et nourrit le plus fol espoir de grignoter les deux places qui restent à franchir pour prétendre disputer une coupe européenne . Bordeaux exulte et Gigi s'exalte . A Yves Harté, dans Sud-Ouest-Dimanche, il explique : " La venue de Luis Carniglia et la rentrée de joueurs de valeur ont contribué à faire avancer Bordeaux . Par la même, je me trouve libéré . Avec une équipe qui a comblé ses lacunes en attaque et en défense, nous pouvons enfin prétendre pratiquer un football réaliste . D'ailleurs, nous rentrons sur le terrain confiants et heureux de jouer . "

Carniglia par-ci, Carniglia par-là, pour Gigi, il n'en veut pas en démordre, la réussite de Bordeaux procède de la confiance insufflée par le sorcier Argentin .

"Uno por tous, tous por uno ! …" Un beau jour, la vieille recette de Helenio Herrera na marchera plus . Le serment passé dans les vestiaires, la main posée sur le ballon, ne suffira plus à vouloir faire se dépasser les Girondins . La dixième place qui sanctionne l'exercice 1978-1979 laisse un goût d'inachevé à la bouche de Gigi : " J'avais espéré que nous finirions beaucoup mieux la saison , c'est vrai, mais je reste persuadé que l'on peut bâtir une grande équipe avec de très bons joueurs …"

Gigi, qui a enrichi son bagage d'une quatrième sélection à l'occasion du match France-Suède comptant pour le championnat d'Europe des Nations, en rentrant à la place d'Henri Michel(77ème) ne veut pas céder au découragement . Il veut croire en sa chance, Claude Bez et Didier Couécou avec lui ….

Bordeaux achète. Bordeaux vend . Les millions circulent librement . Toute la presse en parle . " A la belle saison, une pluie d'étoiles gonfla le port de la lune . Les Girondins accueillirent dans l'effervescence de la période des mutations : Felix Lacuesta le Bayonnais de Bastia, Albert Guemmrich l'Alsacien, Gérard Soler le Monégasque, Omar Sahnoun le Nantais, Jean-Christophe Thouvenel le Parisien de la branche St Germain, Bernard Lacombe le Lyonnais en réserve de la dynastie des verts, et Juan Cabrera, l'Argentin repéré par la famille de Don Luis . Rien que du beau monde promis aux croisières internationales . On aurait dit que la fine fleur du football de France et d'ailleurs se donnait rendez-vous à Bordeaux pour métamorphoser une équipe sans éclat particulier au sein de laquelle la star Alain Giresse paraissait esseulée en une constellation et la hisser au firmament de la saison 1979-1980.;;;"

Tout le monde veut y croire . Presque tous les bannis, des réprouvés, Soler, Sahnoun, Guemmrich,Lacuesta et surtout Lacombe, mis au rencart par Robert Herbin, est plus communicatif : " A Bordeaux, je vais retrouver un football que je pratiquais à Lyon . Il y avait Serge Chiesa, il va y avoir Gigi, un maître pour vous distiller les ballons au moment voulu …"


de gauche à droite debout : Rohr,Guemmrich,Delachet,Domergue,Sahnoun,Meynieu,Van Straelen, Lacuesta
Assis : Tisiot,Thouvenel,Giresse,Lacombe,Soler,Blaquart,Le Blayo

Premier match à Bordeaux: première défaite . Contre le Racing-Club de Strasbourg ( j'y étais aussi), il est vrai tout auréolé de son titre de champion de France . Tois buts à un pour le commando entraîné par Gilbert Gress et, comme il l'avait fait un an plus tôt contre Sochaux, c'est Gigi qui marque l'unique but bordelais .

Et de nouveau les affres du Doute .

Il en a marre Gigi . Il ne comprend plus . Ne connaîtra-t-il donc jamais les plaisirs du joueur à qui tout sourit? Est-il damné? Pourquoi le destin met-il tant d'entêtement à le rabaisser au rang des artistes maudits? Cela ne peut plus durer …

A suivre . Raymond la science

Raymond la science :

Didier Couécou reprend son bâton de pèlerin . A Bruxelles, Raymond Goethals a pris du recul avec les choses du football . Anderlecht, c'était lui . Bordeaux ce sera encore lui . Quand il arrive dans la cité girondine, du haut de la tribune de presse, il assiste le 30 Octobre à la victoire de sa future équipe sur Monaco (3-1) . Pas fou, ce madré de Belge s'enrichit des conseils que lui prodigue Bernard Michelena en matière de préparation physique .

Sept mois plus tard, Bordeaux occupe la sixième place du classement . Raymond la science jubile : avant de s'en repartir outre-Quiévrain, il mijote une bonne histoire belge .

Le 17 mai, St Etienne vient à Bordeaux y défendre son avant dernière chance de ravir le titre au FC Nnates . Mais pour les verts, Bordeaux se transforme en Waterloo . Bernard Lacombe le premier (17ème) fait payer la note . Jean Louis Zanon réplique (39ème), mais, après la mi-temps, c'est le déferlement des bleus vers les buts gardés par Yvan Curkovic . A boulets rouges, Bordeaux tire sur tout ce qui bouge . Ebréchée, la défense stéphanoise concède un but de Giresse (49ème), un autre de Van Straelen (63ème), et un de Thouvenel (73ème) ….

Sur son banc, Raymond Goethals n'en finit plus de tirer nerveusement sur sa cigarette . Tout ébaubis, les dix mille spectateurs du Parc de Lescure s'abandonnent au déchaînement de leurs passion . D'ordinaire, à cinq minute de la fin, ils commencent à déserter les travées . Pas cette fois-ci , du festin ils ne veulent pas perdre la moindre miette .

Il ne reste plus qu'une poignée de seconde et, déjà, M. Vigliani regarde son chronomètre . Gérard Janvion vient de perdre le ballon . Gigi s'en est prestement emparé . Il tire avec son pied, avec son cœur, avec sa tête . Pour la cinquième fois de la soirée, Yvan Curkovic est battu .

Après sept mois , il fait ses adieux à Bordeaux ( il y reviendra quelques années plus tard ) , Raymond Goethals dira " Si j'avais dû ramener un joueur français en Belgique, ce joueur aurait été Alain Giresse"

Jacquet : " Je suis fier de diriger les Girondins "

Saison 1980-1981 Les girondins possède un nouvel entraîneur .
" je suis fier d'avoir été choisi par Bordeaux pour entraîner son équipe " Voilà au moins un entraîneur qui ne pose pas pour les journaliste ! il est vrai qu'une autre attitude n'aurait pas du tout répondu à l'idée que nous nous faisions d'Aimé Jacquet , après avoir été le joueur que l'on sait, homme avant tout de consigne, discret sur un terrain mais pétri de classe .

L'ambiance d'abord .

" Je suis l'homme du dialogue et je n'ai pas du tout apprécié que l'on ait mis mes qualités de psychologue en doute pour me chercher les poux dans la tête. Je ne comprends le rôle d'un entraîneur que si, autour de lui, l'ambiance est celle qu'il a crée, celle qu'il tient à entretenir, celle de la confiance mutuelle entre cet homme seul et ses joueurs .

J' ai choisi Bordeaux , ou c'est Bordeaux qui m'a choisi, peu importe . Ce qui est important c'est que j'ai toujours considéré Bordeaux et plus particulièrement les Girondins, comme un grand club .
Je suis comme le Président Bez, un ambitieux ..Pas pour moi, mais pour les résultats de mon club ". Un discours qui ne pouvait que plaire à Alain Giresse . Le décors étant planté, le spectacle pouvait commencer .

Il est dans la vie d'un footballeur aussi, de ces fragments éclatés où l'absurde fait de vous un "homme révolté" Alain Giresse, déjà n'avait pas admis que la jambe brisée de son ami Daniel Jeandupeux, un sale jour, brisât une exemplaire carrière; il maudit à tout jamais ce 21 Avril 1980 où Omar Sahnoun devient un "homme foudroyé " .
Quand s'acheva la saison 1980-1981, c'est à Omar Sahnoun que Gigi et ses partenaires dédièrent leur qualification pour la coupe de l'UEFA .
Ce rêve, si longtemps caressé, avait pris forme le 22 mai, au pied du célèbre rocher de Monaco . Un symbole : c'en était fini du " mythe de Sisyphe" Gigi bouclé à Haux, en raison d'une déchirure musculaire contractée quelques jours plus tôt contre Strasbourg, en coupe de France, avait appris la nouvelle par voix des ondes . Gigi dix ans après son apparition chez les professionnels, touchait au but …Claude Bez remportait son pari ..Aimé Jacquet se faisait élire " entraîneur de l'année " par ses pairs …


de gauche à droite debout : Trésor,Bracci,Girard,Delachet,Rohr
Assis : Soler,Lacombe,Giresse,Thouvenel,Fernandez,Guemmrich

198161982 6 Deux petits tours en coupe de l'UEFA contre Vikingur de Reykjavik (4-0 et 4-0) et Hambourg SV (2-1 et 0-2 ), ne suffiront pas à faire admettre Alain Giresse sous la coupole . Il n'est pas simple d'endosser l'habit des "verts" . Mais Gunther Netzer, lui, ne s'y est pas trompé . Admiratif devant le succès des Bordealais le 21 Octobre 1981, grâce à deux buts de Guemmrich et Soler contre un penalty de Kaltz, le directeur sportif de Hambourg Sport Vereign, sans tomber dans la flagornerie , visera juste : " Ce Giresse, quel talent ! ".


81/82 Première sortie européenne de l'ère moderne . Les Girondins sont sans pitié pour la modeste formation de Reykjavik . Après, cela sera beaucoup plus dur ...

Oui quel talent. Et quelle humilité, aussi . Quinze jours plus tard, à la sortie du Volksparstadion, Gigi ne se piquera pas de mots pour expliquer le retour ( 2-0) des robustes joueurs allemands. " Nous ne sommes encore que des apprentis en Europe " , confiera-t-il à un journaliste, tout en lorgnan vers de futures campagnes .

Gunther Netzer l'aurait bien aimé le garder, mais tout l'or du rhin ne suffira pas à le convaincre . Il reste que Gigi aura vu sa côte monter sur le marché européen;, au contact de Manfred Kaltz et Horst Hrubresch qu'il retrouvera quelques mois plus tard, en Espagne ( à Séville) , et même caspar Memering qu'il retrouvera à …….Bordeaux .

Mais bien avant que fût annoncée la venue de ce dernier sur les bords de la garonne, d'autres joueurs de renom étaient arrivés à Bordeaux : Dragan Pantelic, le gardien de l'équipe nationale yougoslave, Jean Tigana et Nordine Kourichi, tous internationaux . Plus que jamais Bordeaux s'ouvrait à l'ambition .
Normal! En décembre, après que l'équipe de France eut définitivement acquis le droit de participer au mondial par le truchement d'une formalité réglée sur le dos des Chypriotes (4-0), au Parc des Princes, Bordeaux se partage les premiers rôles du championnat avec St Etienne, Monaco et Sochaux . Il est pratiquement acquis que les troupes d'Aimé Jacquet repartiront sur le front de l'Europe en 1982-1983 .


de gauche à droite debout : Trésor,Pantelic,Bracci,Girard,Kourichi,Tigana Accroupis : Soler,Lacombe,Giresse,Thouvenel, J.Fernandez .

C'est à Font-Romeu, en stage des tricolores, que Giresse,Tigana,Lacombe,Trésor,Soler,Girard,Platini,Battiston,Castaneda,Lopez,Janvion,
Larios ,Ettori,Couriol,Amoros,Bellone,Genghini évalueront leurs chances respectives de devenir champions de France .
Tenu à l'écart du dialogue des "grands" Maxime Bossis ne dira rien . Il sait que le calendrier a fixé rendez-vous aux Girondins, à Nnates, pour la dernière journée du championnat . Ce qu'il ne sait pas, ce qu'il ne peut pas savoir, c'est que le 13 avril Bordeaux perdra tout : son sang-froid, le titre …et Dragan Pantelic, atteint par un sale coup de Lens …

De tout temps à jamais, tant en Coupe q'en Championnat, Nantes-Bordeaux a constitué une affiche de gala . Le gala des artistes . Mais le 7 Mai, comme le titrera l'Equipe, les vingt mille spectateurs accourus dans la théâtre de Marcel Saupin, n'applaudiront jamais qu'à " une grande mascarade" . La faute à qui? Nul, encore n'a pu en dégager la responsabilité . L'histoire retiendra seulement que les Girondins en cette soirée, présentèrent le plus petit gardien du football français : Alain Giresse .

A suivre : 1982 l'année Giresse

Ahhhhhhhh Nap, les maillots "malardeau"!

Que de bons souvenirs...

L'affaire Pantelic reste un peu flou, je crois que Lens avait battu Bordeaux
1-0 sur un but entaché d'un hors-jeu. Il y avait eu un peu de castagne à la fin du match.

Pantelic avait donné un coup de pied à l'arbitre de touche même s'il a toujours dit le contraire..Il avait écopé d'une suspension d' au moins six mois me semble t-il , ce qui précipitera son retour en ex Yougoslavie.



JACQUET:
J' ai choisi Bordeaux , ou c'est Bordeaux qui m'a choisi, peu importe . Ce qui est important c'est que j'ai toujours considéré Bordeaux et plus particulièrement les Girondins, comme un grand club .
Je suis comme le Président Bez, un ambitieux ..Pas pour moi, mais pour les résultats de mon club ".

Prends en de la graine Triaud!

1982 :

En route pour le Mundial Espagnol
de gauche à droite : Giresse, Trésor, Soler,Lacombe,Tigana
amque sur cette photo : Girard

Le Mundial Espagnol

Le siffleur et son Cheik :
Superbe passe de l'éblouissant Platini à Giresse qui l'a sollicité sur sa gauche . Complètement démarqué, le bordelais, dans la foulée prépare son tir . Des tribunes un coup de sifflet retentit, comme il est malheureusement fréquent d'en entendre . L'arbitre soviétique, M Stupar fait signe de continuer . Giresse d'un tir en force marque ce 4ème but qui venait d'être refusé à Bossis , sans que l'on sache pourquoi, son échappée s'étant amorcée dès le rond central .


un coup de sifflet intempestif et M. Stupar refuse à Giresse ce but

Monsieur Stupar indique le centre , les joueurs du Koweït ramènent le ballon, l'arbitre constate le remplacement de Platini par Girard . Tout va très bien Madame la Marquise, sauf que trois dirigeants Koweïtiens rameutent leurs joueurs près du banc de touche .
De la tribune présidentielle, un homme, djelabbah en soie, la tête couverte du traditionnel kaffir, s'agite . Avec les deux mains, au même rythme, allant de droite à gauche, il indique aux joueurs de quitter le terrain , deux officiels expliquent à l'arbitre que les joueurs koweïtiens ont confondu ce coup de sifflet avec le sien . M Stupar se laisse convaincre : il y aura balle à terre à l'endroit ou Giresse détenait le ballon, au moment du coup de sifflet final .

Les joueurs koweïtiens racontent l'heureuse issue à leur prince-président qui applaudit des deux mains, ce revirement .
Cette intervention sans précédent dans les annales du football a fait le bonheur des caméra mens , photographes qui malgrè la présence des gardes du corps, et des policiers essaient de faire leur travail .
Indigné par ce cirque, par cette magouille, Michel Hidalgo veut protester . En survêtement, il n'a pas la tenue de rigueur et se fait malmener par les policiers . Ulcéré, il décide d'aller aux vestiaires, de ne plus rester sur le banc de touche . C'est une manière de protester, digne, devant cette succession de buts refusés .


A l fin du match, Michel Hidalgo consolera Gigi

La France, une lumière dans la nuit :

Le succès sur l'Irlande ayant été acquis sans Platini, il s'est bien trouvé quelques âmes pour mettre en doute son utilité, mais Michel a eu vite fait de les renvoyer brouter leurs chardons . Sa mise au point a été sans bavures et les boys de Billy Bingham n'y ont vu que du bleu .

Alain Giresse s'est offert le luxe suprême de marquer un but de la tête contre la défense britannique dont l'élément le plus petit doit bien mesurer une quinzaine de centimètres de plus que lui . Gigi a impressionné toute l'Espagne, et il est devenu l'un des chouchoux des journaux locaux .Lesquels se montrent d'ailleurs séduits par l'ensemble des français qu'ils ont surnommés " les Brésiliens de l'Europe" . Le compliment est allé droit au cœur de la bande à Hidalgo . Ce dernier, avant le match contre l'Irlande, avait dit à sa troupe :
- La rencontre comporte deux aspects : le résultat et la manière . Le résultat, c'est mon affaire, j'en assume la responsabilité, quel qu'il soit . En revanche, vous, vous êtes responsables de la manière de jouer et donc de votre plaisir -
Deux heures plus tard, le Sélectionneur jubilait : le résultat et la manièere s'étaient parfaitement conjugués ensemble .

Du coup, de nouveaux horizons s'ouvrent devant l'équipe de France . Elle se retrouve dans le dernier carré d'as avec trois adversaires : l'Allemagne,l'Italie et la Pologne , dont elle n'a assurément rien à apprendre question football, au contraire . Les Platini, Giresse,Tigana,Rocheteau ont rejoints à vingt quatre ans de distance les Kopa,Fontaine,Piantoni,Vincent, mais ils peuvent faire mieux . La demi-finale de Séville ne constitue pas forcément un aboutissement, ne serait-ce qu'en raison des limites qu'affiche l'équipe d'Allemagne depuis le début du Mundial et de la déplorable impression qu'elle a laissé au public de Gijon qui l'a vue, et d'une s'incliner piteusement face à l'Algérie, et de deux truquer le résultat de son match avec l'Autriche . " Avec " étant employé ici à dessein de préférence à "contre" .

"Satisfaits, nous le sommes," assure Michel Hidalgo, alors que les bleus quittent leur retraite de Navacerrada, à cinquante kilomètres de Madrid, pour rejoindre le Parador National de Carmona perdu dans la plaine Andalouse qui s'étale autour de Séville . " C'est beau d'être là. Mais je le répète aux joueurs, il faut désirer encore davantage. L'enthousiasme qui les a menés jusqu'ici peut les conduire plus loin encore . "
Hidalgo y croit. Les joueurs aussi :
"Insensiblement, l'espoir s'est glissé dans nos cœurs, ajoute le sélectionneur . Et cet espoir, je le sens très fort . "


France -RFA de gauche à droite, debout : Trésor,Ettori,Janvion,Amoros,Bossis,Tigana Accroupis : Rocheteau,Genghini,Giresse,Platini, Six

Pourtant, les cinq premières minutes que les Français passent sur le stade de Sanchez Pizjuan sont terribles . Les Allemands cherchant le K-O sont partis pied au plancher et assiègent d'entrée la cage d'Ettori . Les absences de Karl-Heinz Rummenigge, qui n'arrive pas à guérir d'une blessure, d'Hansi Müller, lui est rétabli, mais n'a pas encore recouvré l'intégralité de ses moyens et de Horst Hrubesch en froid avec Jupp Derwall ne semblent pas les gêner, les Allemands , mais alors pas du tout …
A –t-elle donc raison la presse espagnole qui ce matin donnait presque unanimement l'Allemagne finaliste? Et Pelé, qui signe dans plusieurs quotidiens des articles creux comme des bambous ( on espère que ce n'est pas lui qui les rédige et qu'il se contente d'apposer son paragraphe et de passer à la caisse) Pelé donc avait-il vu juste en pronostiquant une finale Italie-Allemagne ?? Et tous ceux qui s'évertuaient à présenter l'Allemagne comme une montagne qui allait écraser de sa force massive les petits coqs, avaient-ils raison ?

Alain Giresse, le lutin, n'aurait aucune chance face à Briegel-le-Mastodonte? L'intelligence ne pourrait pas supplanter la force ? La tête devrait s'incliner face aux muscles ?
Tiens, Giresse le voisi qui se pointe aux avants postes . Il tire, une fois, deux fois . Au dessus, on dirait que la France desserre l'étau, que la locomotive allemande s'essouffle un peu.
L'impression se confirme vite . Platini à son tour fait des siennes dans la surface de réparation . Il est contré, sèchement . Ah! Elle ne badine pas la défense de Derwall !!
Ils s'entendent et se complètent bien, Platini et Giresse . Depuis "l'explosion" du milieu de terrain Tigana-Giresse-Genghini, face aux Autrichiens, Hidalgo a décidé de ne se priver d'aucun de ces trois techniciens . Il en fait le bonheur de Jean Tigana qui écumait d'une amertume difficilement contenue depuis le 14 juin . Platini du coup, est passé avant centre.

La France a refait surface depuis un bon moment déjà, et une action Platini-Rocheteau-Genghini vient semer la perturbation dans les rangs adverses quand arrive le coup dur .Les chronos indiquent dix sept minutes . Paul Breitner lance Fischer qui se présente seul devant Ettori . Bien sorti, le gardien monégasque renvoie, mais Littbarski récupère et posément met la balle au fond .

Aïe, le temps se couvre . Pas pour longtemps . Car la France possède toutes les armes pour rivaliser avec l'Allemagne, et ce n'est pas parce qu'elle a encaissé un but qu'elle va changer son fusil d'épaule . Désormais distancée, elle ne dispose plus pour s'en sortir que d'une seule issue : attaquer .
Giresse tire un coup franc vers Rocheteau qui louvoie entre les deux Foerster Karl-Heintz et Bernd .C'est ce dernier qui le bouscule méchamment . On est dans la surface, coup de sifflet de l'arbitre , et oui c'est bien vers le point de penalty que se dirige le doigt du Hollandais Charles Corver .
Michel Platini prend son élan, Schumacher part sur sa gauche, le ballon sur sa droite : 1-1
A la pause, on en est toujours là, et les Allemands commencent à se poser des questions . Eh!Eh! pas si facile à battre que cela ces "petits" Français ….Briegel n'a pas du tout écrasé Giresse,Karl-Heinz Foerster peine à contenir Rocheteau, Dremmler ne parvient pas à juguler Platini . Quand à Kaltz, il connaît aussi des problèmes avec Genghini, et il aurait pu se dispenser de lui mettre une semelle .
L'ancien Sochalien a encaissé le coup en grimaçant . Quatre minutes après la pause, le match s'achève pour lui, il souffre trop, il est remplacé par Battiston .

Les offensives françaises se font plus pressantes désormais, Platini,Giresse,Tigana secouent l'arrière garde d'en face . Va-t-elle rompre ?
Platini lance son copain Battiston, l'ouverture est géniale. Patrick respire l'air Pur . Bol d'oxygène, il a semé tout son monde . Plus personne à droite, plus personne à gauche, la liberté. Avec à l'horizon, le but …reste Schumacher, le gardien du FC Cologne mesure 1m86 et pèse 78 kg , il n'a pas froid aux yeux . Six l'a quelque peu asticoté avant la pause et visiblement il n'a pas aimé .
Harald Schumacher fonce vers Battiston, à toutes jambes, poings en avant…le stéphanois l'a vu et calcule son coup , une petite balle lobée et hop, par ici le paradis !!
Schumacher lui, n'a pas calculé. Il y est allé franco…Battiston git sur la pelouse, inanimé . La balle que Schumacher de toute évidence ne visait pas, est passée juste à côté du but …

Charles Corver reste pantois, il ne sait que faire . Un deuxième penalty? Contre l'Allemagne? Cela se fait-il ? Que dira Herr Neuberger, l'un des grands pontes de la FIFA ? Allemand comme chacun le sait . Et puis, après tout, Battiston a eu le temps de jouer la balle . N'a t-il failli marquer? Allons pas de penalty estime l'arbitre ….
Battiston? Il n'a toujours pas repris ses esprits, Dominique Rocheteau qui s'est penché sur lui appelle de l'aide " j'ai craint qu'il soit touché aux vertèbres, " dira le docteur Vrillac .
Pour une semblable agression, il existe un règlement, il dit : carton rouge . Mais un arbitre peut-il se permettre d'expulser un gardien de but en demi-finale de la Coupe du Monde ?
Normalement oui, mais vous savez ce que c'est : les pressions économiques, politiques, journalistiques ..et la toute puissance d'Hermann Neuberger …..

On emmène Patrick Battiston sur une civière, Michel Platini lui tient la main, image pathétique dans la nuit sévillane . Lorsqu'il reviendra à lui, l'ancien messin demandera :
" où suis-je? ça fait longtemps que je suis rentré sur le terrain ? ".
Il portera une main à sa bouche, manque deux dents, Harald Schumacher dira :
" je suis prêt à lui payer un bridge en or "


A la 61ème minute Patrick Battiston est victime d'une agression caractérisée du gardien ouest-allemand Schumacher .

Non seulement il cogne ce type, mais, en plus il se fout du monde !!!
Battiston est resté dix minutes sur la pelouse , il faut le remplacer, Michel Hidalgo choisit Christian Lopez .

Le public, scandalisé par l'agression du gardien de but allemand, a pris fait et cause pour les bleus . Il les porte à l'attaque comme si c'était l'Espagne qui était sur le terrain ….
Manuel Amoros arme sa frappe, tire…un obus…Schumacher est battu , la balle rebondit sur la transversale; à 20 cm près la France était en finale de la Coupe du Monde …Mauvais signe, peut-être la malchance .Fin du temps réglementaire….

A suivre : Les prolongations....

Excellent Napy, je me souviens de tout ça...Sans vouloir incriminer le pauvre Lopez , sa rentrée sur le terrain face à L'Allemagne s'était révélée catastrophique, le pauvre bougre était completement paumé !

On connait la suite...Erreur tactique de Michel Hidalgo?